Réfutation de ceux qui nient que le glaive fait partie du Christianisme, par Martin Luther



Martin Luther est le père des protestant, ses écrits font autorités chez une grande partie des chrétiens. Dans cet article, nous allons nous intéresser à l'un de ses ouvrages dans lequel il réfute ceux qui prétendent que la guerre ne fait pas partie du Christianisme, fondant ses arguments sur la Bible.





La guerre est une institution divine :

En premier lieu, nous devons donner un fondement solide à la loi et au glaive temporels, afin que personne ne doute que c'est par la volonté et l'ordonnance de Dieu qu'ils existent dans le monde. Les versets de la Bible qui les fondent sont les suivants : Romains 12 : "Que toute personne soit soumise à l'autorité placée au-dessus d'elle; car il n'est pas d'autorité qui ne vienne de Dieu, et toutes celles qui existent ont été instituées par Dieu. Ainsi, celui qui résiste à l'autorité s'oppose à l'ordre que Dieu a établi; et celui qui s'oppose à l'ordre établi par Dieu attirera sur lui le jugement". De même, 1 Pierre 2 : "Soyez soumis à toute institution humaine, soit au roi, en sa qualité de souverain, soit aux gouverneurs délégués par lui pour châtier les méchants et glorifier les gens de bien".

En outre, la loi de ce glaive a existé dès le commencement du monde. En effet, quand Caïn tua son frère Abel, il eut une telle crainte d'être tué à son tour que Dieu prononça une interdiction particulière à ce sujet et abrogea pour lui le pouvoir du glaive afin que personne ne le tuât. Caïn n'aurait pas eu une telle crainte s'il n'avait su et entendu dire par Adam qu'il faut punir de mort les meurtriers. En outre, après le déluge, Dieu rétablit et confirma expressément cette loi en disant, Genèse 9 : "De quiconque aura versé le sang de l'homme le sang sera versé par l'homme". Cela ne peut être compris dans le sens d'un tourment et d'un châtiment infligés par Dieu lui-même aux meurtriers; car beaucoup de meurtriers restent en vie et meurent sans être frappés du glaive, du fait qu'ils ont payé une amende ou profité d'une grâce. Il est bien plutôt question de la loi du glaive, qui veut qu'un meurtrier paye de sa mort et que, conformément à la loi, on le fasse périr par le glaive. Même s'il fait obstacle à la justice ou si le glaive se montre négligent, de sorte que le meurtrier meurt de mort naturelle, l'Écriture ne se trompe pas pour autant quand elle dit : "De quiconque aura versé le sang de l'homme le sang sera versé par l'homme". Car c'est la faute des hommes, et imputable à eux seuls, si cette loi établie par Dieu n'est pas appliquée. D'autres commandements divins ne sont-ils pas transgressés de la même manière?

La confirmation en est également donnée par la loi mosaïque, Exode 21 : "Si quelqu'un tue son prochain avec préméditation, tu l'arracheras de mon autel afin qu'on le fasse périr". Et une seconde fois au même endroit : "Vie pour vie, oeil pour oeil, dent pour dent, pied pour pied, main pour main, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure". Et le Christ le confirme encore quand il dit à Pierre dans le jardin : "Tous ceux qui tireront l'épée périront par l'épée", ce qui doit être compris dans le même sens que Genèse 9 : "De quiconque aura versé le sang de l'homme, etc.". Sans aucun doute, par cette parole, le Christ renvoie à ce verset, en le citant du même coup afin de le voir confirmé. Saint Jean Baptiste enseigne de même : quand les gens de guerre lui demandèrent ce qu'ils devaient faire, il dit : "Ne faites violence ni tort à personne, et contentez-vous de votre solde". Si le glaive n'était pas une institution divine, il aurait dû leur dire d'y renoncer, car il devait conduire le peuple à la perfection et l'instruire très chrétiennement. D'où il ressort avec certitude et suffisamment de clarté que c'est la volonté de Dieu que le glaive et la loi temporels soient maniés afin de châtier les méchants et de protéger les gens de bien. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 73-77.





Il faut contraindre les méchants par la force :

C'est pourquoi Dieu a institué les deux règnes : le spirituel, qui par le Saint Esprit, sous la loi du Christ, fait des chrétiens et des gens de biens; et le temporel, qui fait obstacle aux non-chrétiens et aux méchants, afin qu'ils soient obligés, par des contraintes extérieures, de respecter la paix et de rester tranquilles, qu'ils le veuillent ou non. Telle est l'interprétation que saint Paul donne, Romain 13, du glaive temporel quand il dit que ce glaive n'est pas à redouter pour les bonnes actions, mais pour les mauvaises. Et Pierre dit qu'il est institué pour que la vengeance frappe les méchants. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 85.






Il faut gouverner selon l'Évangile avec le glaive :

Si donc quelqu'un, voulant gouverner le monde selon l'Évangile, s'avisait de supprimer toute loi et tout glaive temporels, sous prétexte que tous sont baptisés et que tous sont des chrétiens parmi lesquels l'Évangile ne veut avoir ni lois ni glaive puisqu'ils n'y sont pas nécessaires, que ferait celui-là, je vous le demande? Il enlèverait les liens et les chaînes des bêtes féroces, leur permettant ainsi de mordre et de lacérer tout un chacun, et prétendrait en plus que ce sont de gentils animaux bien doux et apprivoisés. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 85.






Le chrétien doit soutenir le glaive :

Mais comme un vrai chrétien ne vit pas sur terre pour lui-même, mais pour son prochain et pour le servir, il accomplit aussi, conformément à la nature de son esprit, ce dont il n'a pas besoin lui-même, mais qui est utile et nécessaire à son prochain. Or, le glaive est de grande utilité, et nécessaire pour tout le monde, afin que la paix soit maintenue, que le péché soit châtié et qu'il soit fait obstacle aux méchants. En conséquence, le chrétien se soumet tout à fait volontairement au gouvernement du glaive, paie les impôts, honore l'autorité, la sert et l'aide, et fait tout ce qu'il peut de profitable pour elle, afin qu'elle soit maintenue en vigueur, respectée et redoutée. Et il le fait, bien qu'il n'en ait nul besoin pour lui-même; car il veille toujours à ce qui est utile et bon aux autres, comme l'enseigne Paul, Ephésiens 5. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 93.







Les chrétiens sont les plus aptes à être gouverneur pour servir le glaive :

En résumé : puisque saint Paul dit dans ce passage que le pouvoir est le ministre de Dieu, il ne faut pas en concéder l'usage aux païens seulement, mais à tous les hommes. Car que veut dire "il est le ministre de Dieu" si ce n'est que le pouvoir est par nature ainsi fait que l'on peut servir Dieu en l'exerçant? Ainsi donc, il serait tout à fait non-chrétien de dire qu'il y a un service de Dieu qu'un chrétien ne devrait pas accomplir ou ne serait pas tenu d'accomplir. Car le service de Dieu n'incombe à personne autant qu'aux chrétiens. Et, de même, il serait bon et nécessaire que tous les princes fussent de bons et vrais chrétiens. Car le glaive et le pouvoir, en tant que service particulier de Dieu, incombent aux chrétiens plus qu'à tous les autres hommes sur terre. C'est pourquoi vous devez tenir le glaive et le pouvoir en aussi haute estime que l'état de mariage ou le travail des champs ou l'artisanat, qui ont, eux aussi, été institué par Dieu. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 105-107.







Le chrétien doit utiliser le glaive contre les non-chrétiens et les méchants :

Sixièmement : vous demandez si, dans ces conditions, le chrétien peut, lui aussi, manier le glaive temporel et châtier les méchants, étant donné que les paroles du Christ "Vous ne résisterez pas au mal" sont si dures et si claires que les sophistes ont été conduit à en faire un "conseil". - Réponse : jusqu'ici, vous avez entendu deux choses. La première, c'est que le glaive ne peut exister parmi les chrétiens : c'est pourquoi vous ne pouvez le manier contre et parmi les chrétiens, puisqu'ils n'en ont pas besoin. C'est pour cette raison que la question doit être posée par rapport à la masse des autres, qui ne sont pas chrétiens, à savoir : si, dans ce cas, vous pouvez en faire chrétiennement usage. Et c'est là qu'intervient le second point, à savoir : que vous êtes tenus de servir le glaive et de le soutenir autant que vous pouvez, de votre corps, de vos biens, de votre honneur et de votre âme; car c'est une œuvre dont vous n'avez certes pas besoin, mais qui est très utile et très nécessaire à tout le monde et à votre prochain. C'est pourquoi, si vous voyez qu'il manque un bourreau, un valet de bourreau, un juge, un seigneur ou un prince, et si vous vous estimez apte à ces fonctions, vous devez vous offrir pour les remplir, et les briguer, afin que le pouvoir, qui est si nécessaire, ne soit pas méprisé, ni affaibli, ni ne périsse. Car le monde ne peut s'en passer. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 95-97.


Si, comme il a été démontré plus haut, l'exercice du pouvoir et le glaive sont un service de Dieu, tout ce dont le pouvoir a besoin pour manier le glaive doit nécessairement être aussi un service de Dieu. Il faut en tout état de cause qu'il y ait quelqu'un qui emprisonne les méchants, les mette en accusation, les égorge et les tue, et qui protège les bons, les mette hors de cause, les défende et les sauve. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 115.







Les vrais chrétiens peuvent se venger de leurs ennemis :

Ainsi, nous lisons Juges 15, que Samson dit : "Je les ai traités comme ils m'ont traité eux-même", alors qu'il est dit, en contradiction avec cela, Proverbes 24 : "Ne dis point : je lui ferai comme il m'a fait", et Proverbes 20 : "Ne dis point : je lui rendrai le mal pour le mal". Car Samson avait reçu de Dieu mission de châtier les Philistins et de sauver les enfants d'Israël. Or, bien qu'il cherchât chez ses ennemis une occasion de querelle en prenant prétexte de sa cause personnelle, il ne le faisait pas pour se venger lui-même ni pour rechercher son intérêt propre, mais pour servir les autres et pour châtier les Philistins. Mais personne ne suivra cet exemple, à moins d'être un chrétien parfait et d'être pénétré de l'Esprit. Si la simple raison veut faire de même, elle prétextera sans doute qu'elle ne recherche pas son intérêt propre. Mais ce sera entièrement faux. Car une telle chose n'est pas possible sans la grâce. Ainsi donc, commencez par devenir comme Samson, et vous pourrez faire comme lui. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 117.







Pendant la guerre il est permis de châtier et de piller :

Vous direz alors : "Le prince ne doit donc pas faire la guerre, ni ses sujets le suivre en campagne?". - Réponse : c'est une question complexe. Pour être très bref, je dirai que l'attitude chrétienne en cette matière est qu'un prince ne doit pas faire la guerre à son supérieur, roi ou empereur, ou quelque soit son suzerain, mais qu'il doit laisser faire qui veut prendre. Car on ne doit pas résister par la force à l'autorité supérieure, mais seulement en reconnaissant la vérité. Si l'autorité en tient compte, tant mieux. Dans le cas contraire, ce ne sera pas votre faute, et vous supporterez l'injustice pour l'amour de Dieu. Mais si l'adversaire est de même rang que vous, ou de rang inférieur, ou encore s'il est le sujet d'une autorité étrangère, vous devez commencer par lui offrir justice et paix, comme Moïse l'enseigna aux enfants d'Israël. S'il n'accepte pas, alors songez à prendre l'avantage, et défendez-vous par la force contre la force, comme Moïse le décrit si bien, Deutéronome 20. Mais ce faisant, vous ne devez pas avoir en vue votre seul intérêt ni seulement les moyens de rester le maître, mais vos sujets, à qui vous devez aide et protection, et cela afin que cette oeuvre s'accomplisse dans l'amour. Car puisque votre pays tout entier est en danger, il vous faut tenter, si Dieu veut bien vous aider, de faire en sorte que tout ne soit pas ruiné. Et s'il est vrai que vous ne pouvez empêcher que cela fasse des veuves et des orphelins, vous devez pourtant empêcher que tout soit anéanti et qu'il n'y ait plus que des veuves et des orphelins. Et dans ce cas-là, les sujets sont tenus de suivre, au sacrifice de leurs vies et de leurs biens; là, chacun doit mettre en jeu ses biens et soi-même pour les autres. Et dans une telle guerre, il est chrétien et c'est oeuvre d'amour que de tuer hardiment les ennemis, de piller et de brûler, et de faire tout ce qui peut leur nuire jusqu'à ce qu'ils soient vaincus, comme cela se fait dans toute guerre (sauf qu'il faut se garder de commettre des péchés, de violer les femmes et les jeunes filles). Et une fois qu'ils sont vaincus, il faut accorder clémence et paix à ceux qui se rendent et implorent humblement. Dans un tel cas, il faut donc faire selon le proverbe : "Dieu assiste le plus fort". C'est ainsi que fit Abraham quand il battit les quatre rois, Genèse 14. Sans doute tua-t-il beaucoup de gens et n'accorda-t-il pas sa clémence à beaucoup avant de les avoir vaincus. Car il faut considérer ce cas comme envoyé par Dieu, qui veut par là une bonne fois balayer le pays et en chasser les méchants. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 163-165







Il faut châtier ceux qui veulent se rebeller contre le gouverneur :

Celui qui ne veut pas écouter la parole de Dieu dans la douceur devra écouter le bourreau et ses arguments tranchants! Si l'on me dit que je manque par trop de douceur et de miséricorde en cette affaire, je réponds : il est bien question de miséricorde! Nous parlons maintenant de la parole de Dieu, qui veut que le roi soit respecté et les rebelles perdus. Et pourtant, Il est assurément aussi miséricordieux que nous! Je ne veux ici ni entendre parler ni rien savoir de la miséricorde, mais seulement considérer ce que Dieu veut. C'est pourquoi mon opuscule est juste et le restera, quand bien même le monde entier s'en scandaliserait. Pourquoi parlez-vous sans cesse de miséricorde, quand Dieu veut la colère, et non la miséricorde? Saül ne commit-il pas un péché en faisant miséricorde à Amalek et en n'exécutant pas la colère de Dieu, comme il lui était commandé? Achab ne commit-il pas un péché en faisant miséricorde au roi de Syrie, et en le laissant en vie, contrairement à la parole de Dieu? Si vous voulez la miséricorde, n'allez pas vous associer aux rebelles, mais craignez l'autorité et faites le bien : "Si tu fais le mal, sois plein de crainte, car ce n'est pas en vain qu'elle porte le glaive", dit saint Paul. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 269-271.






Le glaive de l'Ancien Testament n'a pas été abrogé :

Peut-être serait-on tenté ici d'objecter que l'Ancien Testament est aboli et n'a plus d'autorité et que, de ce fait, on ne peut proposer de tels exemples aux chrétiens. A cela je réponds : il n'en est rien. Car saint Paul dit, 1 Corinthiens 10 : "Ils ont mangé du même aliment spirituel que nous et bu du même breuvage spirituel jailli du rocher qu'est le Christ". C'est-à-dire qu'ils ont eu le même esprit et la même foi en Christ que nous, et ont été d'aussi bons chrétiens que nous. C'est pourquoi, ce en quoi ils ont agi droitement, en cela même tous les chrétiens agissent droitement aussi, depuis le commencement jusqu'à la fin du monde. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 99.






Pourquoi Jésus et les apôtres n'ont pas utilisés le glaive :

Mais vous objecterez : "Pourquoi donc le Christ et les Apôtres n'ont-ils pas exercé cette fonction?" - Réponse : Dites-moi pourquoi le Christ n'a pas non plus pris femme, ou pourquoi il ne s'est pas fait cordonnier ou tailleur? Si un état, ou une fonction devrait ne pas être bon pour la seule raison que le Christ ne l'a pas exercé, que deviendrait tous les états et toutes les fonctions existant en dehors de ceux de prédicateur, les seuls qu'il ait exercés? Le Christ a exercé l'état et la fonction qui était siens, mais n'en a pas pour autant réprouvé les autres. Il ne lui revenait pas de manier le glaive, car il ne devait exercer d'autre fonction que celle par laquelle son royaume est gouverné et qui est proprement utile à la cause de son royaume. Or, être marié, être cordonnier, tailleur, laboureur, prince, bourreau, valet de bourreau, rien de tout cela ne fait partie de son royaume, pas plus que le glaive et la loi temporels; seuls en font partie la parole et l'esprit de Dieu, seuls moyens, intérieurs, par quoi les siens sont gouvernés. C'est cette fonction qu'il exerça jadis et qu'il exerce toujours : il continue à répandre l'esprit et la parole de Dieu. Et, dans l'exercice de cette fonction, les Apôtres et tous les gouverneurs spirituels durent le suivre et l'imiter. Car ils ont, avec le glaive spirituel qu'est la parole de Dieu, assez à faire afin d'exécuter leur ouvrage, pour devoir s'abstenir du glaive temporel. Celui-ci, ils doivent l'abandonner à d'autres, qui n'ont pas à prêcher - encore que, comme il a été dit, il ne soit en rien contraire à leur état d'en faire usage. Car tout un chacun doit accomplir son ouvrage et remplir sa vocation.

Aussi, bien que le Christ n'ai pas manié ni enseigné le glaive, il suffit qu'il ne l'ait pas interdit ni aboli, mais qu'il l'ait confirmé, de même qu'il suffit qu'il n'ait pas aboli, mais qu'il ait confirmé le mariage, bien qu'il n'ait pas pris femme lui-même ni enseigné qu'il faut le faire. Car il lui fallait à tous égards se faire reconnaître au moyen d'un état et d'un ouvrage qui ne fussent utiles qu'à son royaume seul; sans quoi l'on eût tiré de son attitude une raison et un exemple obligatoire pour enseigner et croire que le royaume de Dieu ne peut exister sans le mariage, sans le glaive, et autres choses extérieures (car les exemples donnés par le Christ sont absolument contraignants), alors qu'il n'a d'existence que par la parole et l'esprit de Dieu. Telle était, et telle devait nécessairement être la fonction propre du Christ, puisqu'il est le souverain suprême de ce royaume. Or, les chrétiens n'ont pas tous cette même fonction (encore qu'ils puissent l'avoir), de sorte qu'il est juste qu'ils en remplissent une autre, extérieure celle-là, par laquelle ils peuvent également servir Dieu.

Tout cela conduit à une exacte compréhension des paroles du Christ, Matthieu 5 : "Vous ne résisterez pas au mal", c'est-à-dire : le chrétien doit être ainsi fait qu'il supporte tout mal et toute injustice, qu'il ne se venge pas lui-même, ni ne cherche protection pour lui-même devant les tribunaux. Au contraire, il ne doit pas, quand il s'agit de lui-même, avoir besoin en quoi que ce soit du pouvoir et de la justice temporels. Mais pour les autres, il peut et doit rechercher vengeance, justice, protection et secours, et y contribuer autant qu'il peut.
Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 107-109.






Exemples prouvant que le glaive est enseigné dans le Nouveau Testament :

Et si nous voulons prouver cela par le Nouveau Testament, Jean Baptiste fournit un point d'appui solide, Luc 3 : sans aucun doute il lui fallait témoigner pour le Christ, l'attester et l'enseigner; c'est-à-dire que sa doctrine devait être strictement conforme au Nouveau Testament et à l'Évangile, parce qu'il devait conduire vers le Christ un peuple juste et parfait. Et il confirma la fonction des gens de guerre et dit qu'ils devaient se contenter de leur solde. Or, si manier le glaive avait été contraire au christianisme, il aurait dû les en blâmer et les exhorter à abandonner la solde aussi bien que le glaive, sans quoi il ne leur eût pas enseigné correctement la condition chrétienne. Il en est de même avec saint Pierre : prêchant à Corneille la foi du Christ, Actes 10, il ne lui ordonna pas d'abandonner sa fonction, ce qu'il aurait dû faire si elle avait été un obstacle à sa condition de chrétien. En outre, le Saint Esprit descend sur Corneille dès avant son baptême. Et saint Luc vante en lui l'homme de bien dès avant la prédiction de saint Pierre, sans trouver à redire au fait qu'il était centenier des gens de guerre, au service de l'empereur païen. Il est donc juste que ce que le Saint Esprit a laissé subsister sans blâme chez Corneille, nous le laissions subsister nous aussi sans le blâmer.

Un exemple analogue est fourni par l'eunuque et chef éthiopien, Actes 8 : l'évangéliste Philippe le convertit et le baptisa, le maintint dans sa fonction et le laissa rentrer dans son pays, lui qui, s'il avait été privé de glaive, n'eût pu être pour la reine d'Ethiopie un fonctionnaire aussi puissant. Il en fut de même encore avec le proconsul de Chypre Sergius Paulus, Actes 13 : saint Paul le convertit et le laissa continuer à être proconsul régnant parmi et sur les païens. De même firent aussi beaucoup de saints martyrs : obéissants envers les empereurs païens de Rome, ils partirent à la guerre sous les ordres de ceux-ci, et sans aucun doute ils tuèrent aussi des gens pour maintenir la paix. Ainsi écrit-on au sujet de saint Maurice, d'Achatius, de Géréon et de beaucoup d'autres sous l'empereur Julien.

En outre et surtout, il y a ce passage sans équivoque et probant, Romain 13, où saint Paul dit : "Le pouvoir est institué par Dieu" et "Ce n'est pas en vain que le pouvoir porte le glaive; il est le ministre de Dieu pour ton bien et pour châtier celui qui fait le mal". Ne soyez pas, je vous prie, assez sacrilège pour prétendre qu'un chrétien ne peut exercer ce qui est l'oeuvre même de Dieu, son institution et sa création. Sinon, il vous faudrait dire aussi qu'un chrétien ne peut manger ni boire ni se marier, choses qui sont aussi des oeuvres et des institutions de Dieu. Mais si cela est l'oeuvre et la création de Dieu, cela est bon, et bon de telle sorte que chacun peut en faire usage de manière chrétienne et qui plaise à Dieu, ainsi que dit Paul, 2 Timothée 4 : "Tout ce que Dieu a crée est bon, et rien n'est à exclure pour ceux qui croient et reconnaissent la vérité". Par "tout ce que Dieu a crée", il ne faut pas entendre seulement le manger et le voire, le vêtement et la chaussure, mais aussi le pouvoir et la soumission à l'autorité, la protection et le châtiment. Luther et les problèmes de l'autorité civile, Autorité temporelle et obéissance, page 101-105.



Par conséquent, il est faux de dire que le Christianisme est une religion qui est contre la guerre et le glaive.









25/02/2011
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