Ibn Abbâs avait-il foi en l’authenticité des écritures Judéo/chrétiennes ?



Certains missionnaires chrétiens  prétendent que selon le compagnon du Prophète, Ibn Abbâs (radhia Allâhou anhou), un spécialiste en matière de Tafsîr (exégèse du Coran), voire même selon les premiers compagnons du Prophète de manière générale (celle-là, c'est la meilleure), la Torah et l'Evangile entre les mains des chrétiens et des juifs d'Arabie étaient pleinement authentiques, paroles divines dénuées de toutes altérations, et il serait même impossible que ces livres aient pu subir la moindre  modification. Ils se basent pour cela sur un commentaire attribué à Ibn Abbâs.

 

LV. Les mots d'Allah l'Omnipotent, "c'est effectivement un Coran Glorieux préservé sur une Tablette." (85:21-22)

 

"Par le Mont et par un Livre Inscrit" (52:1-2) : Qatada a dit "mastur" signifie "écrits". "Yasturun" (68:1) signifie "ils inscrivent" et Umm al-Kitab (43:4) est tout le Coran et sa source. [Il a dit que] "ma talfizu" (50:18) signifie : "il ne dit rien, mais cela est écrit contre lui." Ibn 'Abbas a dit, "Tant le bien et le mal sont enregistrés," et "yuharrufuna" (4:46) signifie "ils déplacent". PERSONNE N'ENLÈVE LES MOTS [sic] D'UN DES LIVRES D'ALLAH L'OMNIPOTENT, MAIS ILS LES TOURNENT, LES  INTERPRETENT DE MANIÈRE MALSÉANTE.


http://bewley.virtualave.net/bukhari52.html


 
A l'évidence, ceci montre clairement la vue des premiers musulmans (au moins de deux proéminents), à savoir qu'ils ont cru que les Saintes Écritures qui ont été révélées avant le Coran comme la Torah et l'Evangile sont restées intactes et non corrompues.

 

Source : http://facealislam.free.fr/ibnabbas-bible.html

 

 

À vrai dire, le titre de l'article "Ibn Abbâs sur l'intégrité de la Bible" se révèle être fortement impropre pour ne pas dire mensonger dans la mesure où ce commentaire parle de la Torah et l'Evangile et non pas du livre intitulé "la Bible". La Bible se limite-elle à la Torah et à l'Evangile (aux évangiles pour être plus précis puisque l'Evangile n'existe plus sous sa forme originale)? Selon le missionnaire oui. L'objectif de cet article est de clarifier ce que Ibn Abbâs, d'après les sources dont nous disposons, pensait des écritures des juifs et des chrétiens. Notons toutefois que le missionnaire use d'un argument spécieux, en l'occurrence une généralisation abusive, en prenant simplement le cas de Ibn Abbâs et en généralisant ce cas ("la vue des anciens musulmans").



1) L'avis d' Ibn Abbâs

 


Il convient de clarifier définitivement la chose : Ibn Abbâs était d'avis que les écritures judéo/chrétiens étaient empreintes de corruption. Le plus célèbre de ses commentaires est cité en explication du verset coranique 2/79:

 
Malheur, donc, à ceux qui de leurs propres mains composent un livre puis le présentent comme venant de Dieu pour en tirer un vil profit ! - Malheur à eux, donc, à cause de ce que leurs mains ont écrit, et malheur à eux à cause de ce qu'ils en profitent !  


'Ubaidullah Ibn 'Abdullah a rapporté ces propos d'Ibn Abbâs:


"Comment pouvez-vous avoir recours aux Gens de l'Ecriture, lorsque vous avez le Coran, que Dieu a révélé à son Prophète après leurs livres, et que vous lisez dans toute sa pureté originale. Dieu vous a dit comment les Gens de l'Ecriture ont changé le livre de Dieu, comment ils ont écrit un ouvrage de leurs mains, qu'ils ont ensuite présenté comme provenant de Dieu, et cela par l'avidité du gain. La science que vous avez reçue ne doit elle pas vous empêcher de leur rien demander ? Non, pas Dieu, aucun d'eux n'est jamais venu vous demander ce qui vous a été révélé, à plus forte raison ne devez pas avoir recours à eux".


Source : Sahîh Al-Bukhârî, Volume 9, Livre 93, N. 614, Traduction de Muhsin Khan


http://www.usc.edu/dept/MSA/fundamentals/hadithsunnah/bukhari/093.sbt.html


Ikrima rapporte d'Ibn Abbâs :


"Comment pouvez-vous interroger les Gens de l'Ecriture au sujet de leurs livres tandis que vous avez le Livre d'Allâh (le Coran), qui est le plus récent des Livres révélés par Allâh, et que vous le lisez sous une forme pure, non altérée? "

 


Source: Sahîh al-Bukhârî, volume 9, livre 93, n° 613, traduction de Mushin Khan.



Voir aussi sur le même site:


Sahîh Al-Bukhârî Volume 9, Book 92, Number 461

Sahîh Al-Bukhârî i Volume 3, Book 48, Number 850


Ibn Abbâs clarifie effectivement le sens de ce verset en précisant, à travers les mots "les Gens de l'Ecriture ont changé le livre de Dieu", le fait que c'est bien à un texte venant à l'origine de Dieu (donc de l'Ancien Testament) qui est visé par le verset 2/79, et non le Talmud, comme certains chrétiens (Sam Shamoun) l'allèguent.


Cette vue était partagée également par d'autres des premiers musulmans comme, par exemple, le troisième Calife bien guidé, Uthmân Ibn Affân, disant:


Parce qu'ils (les Juifs) ont altéré la Torah. Ils y ont ajouté ce qu'ils ont aimé et en ont effacé ce qu'ils détestaient et ils ont effacé le nom de Mouhammad, paix soit sur lui, de la Torah et pour cela Allah est devenu en colère (contre eux). (Tafsîr Ibn Kathîr, Commentaire de la Sourate 2:79, Source)



Problème : N'y a-t-il pas ici une contradiction entre deux avis opposés, tout deux attribués à Ibn Abbâs ? Si, alors ces chrétiens nous proposent l'exégèse suivante :


La narration où Ibn Abbas questionne l'intégrité textuelle des Livres précédents doit être rejetée.


Naturellement, c'est le commentaire qui arrange ces chrétiens qui est retenu.


Dans cette perspective, c'est la narration qui convient le mieux à ce que le Coran enseigne réellement qui devrait être accepté comme vrai. Et puisque le Coran confirme explicitement l'autorité et la préservation de la Bible :

 

Ni l'autorité, ni la préservation. Le Coran ne dit rien de tel. Mais revenons à Ibn Abbâs.

 

Ar-Razî dit dans son Tafsîr en commentaire du verset 2/75 :


Ils ont falsifié la description du Prophète (saws) ou ils ont falsifié les commandements de Dieu comme celle de la lapidation. Al-Qadhi dit : La falsification peut être une falsification ou une modification de sens, mais la falsification est plus sure, comme cela a été rapporté de Ibn Abbâs lorsqu'il dit qu'ils ont fait des ajouts et des suppressions... (Source)


Abû Al-Hasan Alî Ibn Mouhammad Ibn Habib al-Mawardi (d. 450 A.H.) écrit dans son commentaire du Saint-Coran, Al Nakat Wal U'yoon, à propos de Coran, 2/79 :


Premièrement: Le mot Ummi dans le verset peut se référer à quelqu'un qui ne savent ni lire ni écrire, et c'est l'avis de Moujahid et l'interprétation la plus apparente. Deuxièmement: Le mot Ummi dans le verset peut se référer à un peuple qui ne croit pas en un Messager qu'Allah a envoyé, et ils ne croient pas dans un livre que Dieu a envoyé, et ils ont écrit un livre de leurs propres mains et ils apprennent aux gens ignorants "Ceci vient de Dieu", et c'est l'avis d'Ibn Abbâs. (Source)  

 

À propos du verset coranique 2 :44, l'Imâm At-Tabarî note :

 

En ce qui concerne le verset "Et ne mêlez pas le faux à la vérité": La vérité: Il s'agit de la Torah que Dieu a révélé à Moïse. Mensonge: c'est ce qu'ils ont écrit à partir de leurs propres mains .... Il a été rapporté que Ibn Abbâs et d'autres ont dit 'Ne mélangez pas la vérité de ce que vous avez dans le livre avec le mensonge ", et ceci est le changement et la substitution. (Ibn Jarir At-Tabarî, Jami al-bayan fi ta'wil al-Qur'an, Commentaire de la Sourate 2:42, Source)

 

 
Le commentaire attribué à Ibn Abbâs dit...

 

(Therefore woe) severe punishment, and it is said this means: a valley in hell (be unto those who write the Scripture with their hands) change the description and traits of Muhammad (pbuh) in the Book (and then say, "This is) in the Book that has come (from Allah", that they may purchase) through changing and altering it (a small gain therewith) a small gain in terms of means of subsistence and surplus of property. (Woe unto them) theirs is a severe punishment (for what their hands have written) have altered (and woe unto them) and theirs is a severe punishment (for what they earn thereby) of unlawful earnings and bribes.

 

Source:http://www.altafsir.com/Tafasir.asp?tMadhNo=2&tTafsirNo=73&tSoraNo=2&tAyahNo=79&tDisplay=yes&UserProfile=0

 

 

Dans son commentaire, Ibn Kathîr cite le Hadîth authentique rapporté par Al-Hakîm et An-Nassaï  et qui est aussi cité par al-Qurtubî et At-Tabarî :

 

(…) Ibn Jarir et Abû `Abdur-Rahman An-Nasa'i – et ceci est leurs propos– ont rapporté que Ibn `Abbas a dit, "Il y avait des rois après `Isa qui changèrent la Tawrah et l'Injîl alors qu'il y avait encore des croyants qui récitaient la Tawrah et l'Injîl. (…)

 

Source :http://abdurrahman.org/qurantafseer/ibnkathir/ibnkathir_web/57.52696.html

 

 

Tahar Gaïd écrit dans son commentaire des versets 75/79 de la Sourate al-Baqqara :

 

(…) A première vue, ces derniers versets s'adressent aux Juifs contemporains du Prophète - que Dieu lui accorde la grâce et la paix -. Pourtant, selon Ibn 'Abbâs et Muqâtil, ils ont été révélés au sujet des soixante-dix hommes choisis par Moïse pour l'accompagner au Mont Sinaï où il reçut la Parole de Dieu. Ayant entendu Dieu ordonner et interdire, ils revinrent vers leur peuple. Les hommes sincères témoignèrent fidèlement de ce qu'ils avaient vu et entendu. Mais un groupe d'entre eux déclara : Nous avons entendu Dieu déclarer que si vous pouvez accomplir Mes commandements, faites-le. Toutefois, si vous n'en êtes pas capables, abstenez-vous et il ne vous sera rien reproché (…)


Source :http://le-minaret.com/le-noble-coran/tafsir/sourate-2-al-baquara-commentaire-v62-93.html

 

 

Les traditions suscitées nous permettent d'établir l'affirmation  selon laquelle d'après  le compagnon du Prophète, Ibn Abbâs, les écritures judéo/chrétiennes n'étaient nullement protégées contre toute forme de manipulations des mains humaines et il est impossible qu'il est émis un tel jugement, jugement relevant de l'élucubration. Concernant les propos d'Ibn Abbâs, relatifs au caractère corrompu des textes Judéo/Chrétiens, et leur degré de représentativité au sein des premiers musulmans, Ibn Hazm a dit, d'après ce qu'en cite Muhammad Abû Laylah:

 

Il n' y a pas de différence entre les compagnons à ce propos. (Ibn Hazm, Al-Fasl fi'l Milal, Volume 2, p. 3, cité par Muhammad Abû Laylah dans "The Qu'ran and the Gospels: A comparative study")

 

 
L'on n'est pas étonné non plus de retrouver ce genre d'appréciation chez les successeurs tel l'éminent exégète, Mujâhid Ibn Jabr (d.722 ap JC), interprétant les mots de Dieu :

 

Et quand Jésus apporta les preuves, il dit : "Je suis venu à vous avec la sagesse et pour vous expliquer certains de vos sujets de désaccord. Craignez donc Dieu et suivez-moi. (Coran, 43.63)

 

Mujâhid dit : "Je suis venu à vous avec la sagesse et pour vous expliquer certains de vos sujets de désaccord" : A propos de la modification de la Thora. Tafsîr al-Qurtubi sourate 43.63 & Tafsîr al-Tabari sourate 43.63

 

Cette assertion est d'autant plus intéressante que ce que dit Mujâhid correspond étroitement à l'exégèse d'Ibn Abbâs :

 

Ibn Taymiyya  explique ainsi:


Il y a parmi les Tâbi'ûn, ceux qui ont reçu l'ensemble de l'exégèse du Coran de la part des Compagnons. À ce propos, Mujâhid a dit : "J'ai exposé le Coran devant Ibn Abbâs. Je m'arrêtais à chaque verset et je le questionnais sur celui-ci". C'est ainsi que Ath-Thawri a dit: "Si l'exégèse du Coran te vient de Mujâhid, cela te suffit". (Ibn Taymiyya, introduction aux fondements de l'exégèse du Coran, Editions Sabil, 2004, page 33)

 


Evidemment, si l'enseignement d'Ibn Abbâs relatif aux Livres antérieurs était qu'ils sont intouchables, incorruptibles, protégés, Mujahid, qui fut son élève n'énoncerait pas de tel propos.

 

 
Toutefois, il faut préciser que l'altération peut ne concerne rque des éléments accesoires dans les Ecritures Hébraïques comme l'effacement du nom de Muhammad, saws, ou certains passages confortant le complexe de supériorité des Juifs sur les Gentils, faisant des fils d'Israël, des gens "purs, supérieurs" à contrario des autres ethnies impures. Ceci parce qu'une grande partie de la Torah entre les mais des Juifs s'accorde avec le Coran dans "l'esprit théologique", et du point de vue historique, les erreurs qu'ils l'entachent sont plutôt dues à des problèmes de préservation et de transmission qu'à des falsifications volontaires. L'objet de ce discours était simplement de montrer qu'il est tout bonnement IMPOSSIBLE qu'Ibn Abbâs ait nié la possibilité d'altération dans ces écrits puisque c'est lui-même qui évoque ce phénomène d'altération.

 

 

2/ L'authenticité et le sens de ce commentaire

 


La fameuse déclaration dite de Ibn Abbâs n'est pas un Hadîth du Sahîh al-Bukhârî mais une simple note de bas de page comme al-Bukhârî en incluait parfois dans son recueil et qui ne sont pas toutes nécessairement authentiques.


Sheikh Gibril Fouad Haddad explique:


Cette conclusion [que Bukhari est 100% authentique] exclue les récits rapportés sans chaîne, les rapports dont les chaînes sont incomplètes, ou des rapports faussement attribués (inatribués) parfois introduits par al-Bukhari dans ses chapitres-titres ou ajoutés à certaines narrations.  Un exemple de cela est le soi-disant "hadith du suicide" - l'un des rapports faussement attribués (balaghat) à al-Zuhri dont la chaîne de transmission comporte en fait des trous et est en cela faible. Il ne rassemble pas les critères d'authenticité du hadîth utilisés par les grands et moins grands maîtres du Hadîth, et encore moins ceux de al-Bukhari qui l'a mentionné seulement pour montrer sa divergence avec deux autres chaînes dont les versions omettent l'histoire de la tentative de suicide, et Allah sait mieux. La conclusion ci-dessus est une preuve que l'opinion selon laquelle toute chose qui est trouvée dans les deux Sahîh sont rigoureusement authentiques concerne seulement les rapports aux chaînes de transmission catégoriquement continues, attribuées au Prophète Muhammad. (Source)

 

En examinant l'authenticité du commentaire auquel s'accroche désespérément les missionnaires chrétiens, une question nous vient à l'esprit. Où est la chaîne de transmission complète de ce rapport? Nous ne trouvons nulle part de chaîne de transmission complète de cette prétendue déclaration d'Ibn Abbâs.

 

Commentant la façon dont ce rapport attribué à Ibn Abbâs nous est parvenue, le grand Muhaddith Hafîz Ibn Hajar Al-Asqalani écrit :

 

Je ne l'ai pas trouvé [ce Hadîth] avec une chaîne de rapporteurs continue (mawsoul) sur l'autorité d'Ibn Abbâs en dépit du fait que ce qui est dit avant est bien de ses mots de même que ce qu'il vient après (Ibn Hajar Al Asqalani, Fath-ul-Bari fi Sharh Sahîh Al-Bukhârî, Livre de "l'Unicité de Dieu", Chapitre 55, n°  6223)

 

Beaucoup de nos gens ont explicitement déclarés que la Torah et l'Evangile ont été corrompus en contradiction avec ce que Al-Bukhârî mentionne ici [sur l'autorité de Ibn 'Abbâs]. (Ibid)

 

Ibn Hajar dit cela car il existe d'autres narrations authentiques où Ibn Abbâs dit que les Judéo/chrétiens font des erreurs et des altérations par exégèse. Toutefois, la partie cruciale où Ibn Abbâs nie que des changements aient pu se produire : PERSONNE N'ENLÈVE LES MOTS [sic] D'UN DES LIVRES D'ALLAH, elle n'a pas été rapportée de façon authentique (sahîh). Cette narration est donc douteuse.


Egalement, Moiz Amjad écrit à propos de ce commentaire:


(…) Bukhari, qui a mentionné l'opinion tenue par Ibn Abbâs' (ra), n'a, cependant, mentionné aucun des arguments à partir des quels Ibn Abbas (ra) aurait pu fonder son opinion, ou pour les quels il l'aurait soutenu. Il faut aussi rappeler le fait que l'opinion attribuée à Ibn Abbâs (ra) a été mentionnée alors qu'elle ne comporte aucune référence à  la chaîne des rapporteurs, qui rapportent cette opinion de la part du compagnon (ra) du Prophète (asws) (…).
(Moiz Amjad, Source)


Et tous les savants du hadîth sont d'accord que l'on ne peut juger authentique un hadîth ou un commentaire remontant à un Sahaba que si nous disposons de la chaîne de  transmission complète pour l'examiner et conclure si elle est authentique ou non (à moins qu'il ne s'agisse d'un rapport mursal et qu'il est corroboré par d'autres récits fiables).


L'Imâm Al-Badr al-'Aini note dans son commentaire du Sahîh Al-Bukhârî :


Al-Bukhârî relate fréquemment des rapports et des dires des Sahaba et d'autres sans Isnad (chaîne de transmission) (Al-Badr Al-'Aini, Umdat-ul-Qari, Volume 1, page 9)


La déclaration dite de Ibn Abbâs, une note de bas de page que al-Bukhârî a inclus dans son recueil, en fait clairement partie et doit à ce titre être rejetée.


Mais indépendamment de cela, pour les besoins de l'argumentation, la déclaration dite de Ibn Abbâs peut être réinterprétée de façon à être compatible avec les autres déclarations univoques qu'il a faites et qui elles sont indiscutables. C'est que Ibn Abbâs avait l'intention de dire que les Gens du Livre, si ils ont pu avoir changé ce qui est entre leurs mains,  ne pouvaient changer par contre le texte d'origine, authentique, étant auprès de Dieu sur Al Lawh al Mahfudh (la table préservée), de façon à ce qu'il soit détruit et sujet à la perte définitive,  puisque cette parole d'Allâh est intacte, inaltérable et éternelle.


Ibn Kathîr dit dans son commentaire de la Sourate 85, verset 21-22 ...


Mais c'est plutôt un Coran glorifié signifie magnifique et noble


Préservé sur Al-Lawh Al-Mahfuz (note: la Table gardée auprès de Dieu) signifie (…) gardé de toute interpolation, altération, déformation ou de changement (Tafsîr Ibn Kathîr, Source)


Nous voyons ici que le Coran est présent auprès de Dieu, dans la Table gardée, préservé de toute altération, corruption et cela augmente davantage la probabilité du fait que c'est à cela que Ibn Abbâs se référait si il a tenu ses propos. Son intention était de dire que la parole globale de Dieu, dont la Torah de Moïse et l'Evangile de Jésus, entre autres font partie intégrante, est préservée dans le Table gardée et ne peuvent ainsi être changés par qui que ce soit, en revanche les livres du même nom sur la terre pouvaient être sujets à toutes les formes d'altérations. À cela, certains chrétiens rétorquent que les juifs et les chrétiens ne peuvent monter aux cieux pour les lire et mal les interpréter, ce qui prouve que Ibn Abbâs parle des livres terrestres dans leurs mains sinon ils ne pourraient pas les interpréter indûment. Mais cette réponse ne prouve rien du tout car dans ce qu'il lui est attribué Ibn Abbâs pouvait très bien parler des juifs et des chrétiens qui interprétaient leurs livres au moment où ces derniers étaient encore authentiques du temps des Prophètes Moïse (as) et Jésus (as). C'est aussi simple que cela.


Ceci nous permet aussi de clarifier au passage les propos de Wahb Ibn Munabdih :


Ibn Kathir, enregistre aussi un commentaire de Wahb bin Munabbih:

 

Wahb bin Munabbih a dit "La Tawrah et l'Injil RESTENT COMME ALLAH LES A INDIQUÉS, ET AUCUNE LETTRE DANS EUX N'A ÉTÉ ENLEVÉE. Cependant, le peuple égare d'autres par l'addition et l'interprétation fausse, SE FONDANT SUR DES LIVRES QU'ILS ONT ECRITS EUX-MÊMES." Puis,

 

< ils disent: "c'est d'Allah," mais il n'est pas d'Allah;>

 

Quant aux livres d'Allah, ILS SONT TOUJOURS PRÉSERVÉS ET NE PEUVENT PAS ÊTRE CHANGÉS."

 

Source : http://facealislam.free.fr/reponse_mohammed1.html

 

 

Le missionnaire cite le Tafsîr d'Ibn Kathîr mais omet, pour une raison inconnue, un passage crucial de ce même Tafsîr :


Cependant, si Wahb parlait des livres qui sont en circulation dans les mains des Gens du Livre alors nous devons dire qu'il n'y a pas de doute quand au fait qu'ils les ont altéré, distordus, et ont ajouté et retranché d'eux. Par exemple, les versions Arabes de leurs livres contiennent des erreurs flagrantes, beaucoup d'additions et de suppressions et d'énormes erreurs d'interprétations. Ceux qui ont effectué ces traductions ont fait preuve d'une compréhension incorrecte dans la plupart, plutôt ans toutes ces traductions. Si Wahb entendait parler des Livres d'Allah qu'Il a avec Lui, alors en effet, ces Livres sont préservés et ne furent jamais changés.


Source : http://www.tafsir.com/default.asp?sid=3&tid=8599

 


Ce disant, Ibn Kathîr n'essaie pas de prouver qu'altération il y eu mais veut simplement mettre en évidence qu'il est tout bonnement IMPOSSIBLE qu'Ibn Abbâs et Wahb Ibn Munabbih ait voulu dire que les textes des Judéo/chrétiens sont in altérables puisque encore à son époque, des altérations, ne serait  ce  quepar le biais d'une mauvaise traduction, se produisaient, et ce, de  manière flagrante. Le sens du propos était donc forcément à aller chercher ailleurs.



Conclusion 
: Clairement, la position des premiers érudits musulmans tels que Ibn Abbâs ou davantage postérieurs n'est guère favorable aux écritures judéo/chrétiennes. Selon eux, les livres que les chrétiens et les juifs ont actuellement en leur possession étaient plutôt empreints de corruption.

 


Moussa Youssouf, Tounsidu20


 

 

 

 




31/07/2008
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